mercredi 5 mars 2008

L'OSCE célèbre ses dix ans de défense de liberté des médias

Le responsable du KGB biélorusse, Stepan Sukharenko, lors d'une conférence de presse en mars 2006. La Biélorussie fait des pays membres de l'OSCE où la liberté de la presse est mise à mal.
AFP/STR

INSTITUTION RENCONTRE AVEC MIKLOS HARASZTI

A première vue, le bilan est sombre. "On constate une détérioration de la liberté des médias aussi bien à l'Ouest qu'à l'Est", regrette Miklós Haraszti, le représentant de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) pour la liberté des médias, qui a célébré ses dix ans vendredi 29 février. "Raison de plus pour continuer à se battre, à dénoncer et à plaider pour la liberté d'expression dans les 56 pays membres."

Successeur de l'Allemand Freimut Duve, Miklós Haraszti, ancien dissident hongrois, considère sa mission comme la poursuite de son engagement passé. A ces différences près qu'il se bat désormais sur un front international et qu'il agit pour le compte d'une organisation intergouvernementale. "Cela donne des privilèges dont les ONG sont dépourvues."

Comme celui d'interpeller directement les ambassadeurs en séances plénières. Un moyen de pression efficace dans le cas du projet de loi slovaque sur les médias. S'appuyant sur la critique du représentant de l'OSCE, l'opposition au gouvernement de Robert Fico boycotte le vote sur le traité européen tant que des amendements n'auront pas été apportés.

Soucieux de ne pas paraître partial, le "chien de garde" de la liberté des médias n'exempte de sa veille aucun des 56 Etats qui, d'Europe à l'Amérique du Nord, en passant par le Caucase et l'Asie centrale, ont adhéré aux principes de la charte d'Helsinki de 1975. "A l'Ouest, l'inquiétude sécuritaire liée à la menace terroriste a souvent conduit à des mesures restreignant la liberté des médias. On fait pression sur les journalistes pour les contraindre à révéler leurs sources d'information, ou bien on les menace de poursuites judiciaires pour divulgation de renseignements jugés stratégiques."

L'établissement d'une législation qui protège les sources d'information et l'abolition des lois qui permettent d'envoyer un journaliste en prison pour diffamation sont les deux principaux chevaux de bataille du représentant de la liberté des médias. A cet égard, Miklós Haraszti se réjouit du projet de loi sur la protection des sources, annoncé début février par le garde des sceaux français.

"La jurisprudence des vieilles démocraties européennes exclut le plus souvent qu'une peine d'emprisonnement soit infligée à un journaliste, explique-t-il. Ailleurs, cette tradition n'existe pas." Pour avoir reproduit des caricatures de Mahomet, publiées au Danemark en 2005, le directeur d'une publication biélorusse a été condamné à trois ans de prison en janvier 2008.

RESTRICTION AU PLURALISME

Mais la législation seule ne suffit pas, car la restriction au pluralisme prend parfois des formes subtiles. Ainsi, en Russie, un règlement administratif kafkaïen et des droits d'enregistrement dissuasifs transforment en parcours du combattant l'autorisation de publication des médias indépendants. Autre priorité de l'OSCE : l'Internet. "Ce média, appelé à devenir une des principales sources d'information, est partout surcontrôlé", déplore le défenseur de la liberté des médias.

Quand il n'est pas au siège de l'OSCE à Vienne pour communiquer ses inquiétudes ou ses recommandations à un ambassadeur, le représentant de la liberté des médias s'emploie à propager sur le terrain un environnement favorable au pluralisme. Son équipe de 15 personnes organise des formations en journalisme ou réunit agents gouvernementaux et représentants de la société civile dans les républiques du Caucase et d'Asie centrale. Un face-à-face qui ne va pas de soi, mais dont l'ancien dissident, familier des "tables rondes" durant la transition hongroise vers la démocratie, connaît l'importance.

Dans sa mission le représentant intergouvernemental n'oublie pas son passé : "Un des aspects de mon mandat est de porter les atteintes à la liberté d'expression sur la place publique, ce qui ne plaît pas aux gouvernements mais répond aux attentes des sociétés civiles."

Laurence Monnot
LE MONDE | 04.03.08 | 14h53 • Mis à jour le 04.03.08 | 14h53
http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2008/03/04/l-osce-celebre-ses-dix-ans-de-defense-de-liberte-des-medias_1018600_3236.html?xtor=RSS-3236

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