jeudi 28 février 2008

Medvedev en campagne télévisée pour une victoire annoncée

A quatre jours du scrutin présidentiel en Russie, Dmitri Medvedev, 42 ans, dauphin de Vladimir Poutine, s'est présenté pour la première fois en tant que candidat devant un parterre d'électeurs à Nijni-Novgorod (est de Moscou). Pour l'occasion, il a pris, mercredi 27 février, "un jour de vacances non payé", a précisé le gouvernement russe.

Habituellement, quand Dmitri Medvedev fait campagne, sillonnant la Russie ou apparaissant à la télévision, ce n'est pas en qualité de candidat à l'élection présidentielle du 2 mars mais de premier vice-premier ministre. "Pendant la période électorale, le gouvernement ne doit pas travailler au ralenti", a justifié Vladimir Tchourov, le président de la commission électorale centrale.

Dimitri Medvedev, bien avant l'ouverture de la campagne, devançait déjà ses rivaux grâce à ses multiples apparitions sur le petit écran. Selon une étude du centre d'analyse des médias Medialoguia, entre le 10 décembre - quand Vladimir Poutine l'a désigné comme successeur - et le 26 février, Dmitri Medvedev est apparu 1 832 fois sur les chaînes de la télévision publique. Dans le même temps, le candidat Vladimir Jirinovski a été montré 533 fois, Guennadi Ziouganov 479 fois et Andreï Bogdanov 258 fois. Le Parti communiste russe, qui avait déposé une plainte à ce sujet, a été débouté, mardi, par un tribunal moscovite.

Aux journaux télévisés, M. Medvedev crève l'écran. On ne voit que lui : en visite aux champs, en train de deviser avec une famille de la classe moyenne, occupé à l'inauguration d'un hôpital. En fait, le poulain de M. Poutine a ravi la vedette à son maître. A en juger par la fréquence de ses apparitions télévisées, il l'a déjà remplacé. L'élection n'est plus qu'une simple formalité. La seule incertitude porte sur l'ampleur de sa victoire dès le premier tour de scrutin.

L'impétrant au visage d'écolier sage est si sûr de l'emporter qu'il a refusé de participer aux débats électoraux télévisés. Bien trop pris par ses activités de vice-premier ministre, il n'a pas le temps. Cet argument est une garantie du sérieux du candidat Medvedev. L'autre garantie est son adoubement par Vladimir Poutine. A Nijni-Novgorod, il a promis de poursuivre la politique menée par le président sortant. La Russie, "gavée de révolutions", a bien besoin d'un "répit", a-t-il souligné.

La stratégie du Kremlin est de laisser entendre aux électeurs que rien ne changera après l'élection. M. Medvedev en est la meilleure illustration. Il a de plus en plus fréquemment les tics de langage de son mentor. Mardi, il a indiqué qu'il était prêt à travailler avec le futur président américain à condition que celui-ci ne professe pas d'idées "à demi-séniles".

Dépourvue d'enjeux, de débats, de programmes, la campagne électorale est bien terne. Les seules affiches visibles sont celles de Russie unie, le parti au pouvoir, montrant côte à côte Vladimir Poutine et son protégé. Récemment, à Moscou, des annonceurs publicitaires ont déploré, sous le sceau du secret, avoir été contraints de céder des espaces publicitaires exclusivement à Russie unie. Selon la presse, les gouverneurs de régions se sont vu enjoindre de garantir une participation de 65 % alors que la notion de seuil de participation - fixé jadis à 25 % - a disparu de la nouvelle loi électorale.

Fidèles à la tradition soviétique, les bureaux de vote ne lésinent pas sur les moyens pour inciter l'électorat à se déplacer : distribution de nourriture, bons de réductions, billets de concerts. A Sotchi, une loterie de voitures sera proposée ; à Tcheliabinsk, des crêpes seront offertes (la chandeleur est célébrée le 3 mars). Les opérateurs de téléphonie mobile ont pris soin d'envoyer des messages sur les portables de leurs abonnés : "N'oubliez pas d'aller voter, votre voix est importante pour le pays." Selon une pratique éprouvée à l'occasion des législatives du 2 décembre 2007, les électeurs pourront voter dans n'importe quel bureau de vote, de préférence à proximité de leur lieu de travail, sous l'oeil vigilant de leurs supérieurs hiérarchiques.

Marie Jégo

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