mardi 1 avril 2008

Bush-Poutine : rencontre de la dernière chance


Vladimir Poutine et George W. Bush, en juillet 2007.
Crédits photo : ASSOCIATED PRESS

Le président américain a accepté l'invitation de son homologue russe à l'issue du sommet de l'Otan. L'occasion de surmonter les tensions et, peut-être, d'achever leurs mandats respectifs sur un accord.
Après les nombreuses déconvenues de sa politique étrangère, George W. Bush est animé d'un étonnant regain d'ambition alors qu'il s'embarque aujourd'hui pour un voyage délicat en Europe de l'Est.
Plus que du sommet de l'Otan consacré à l'élargissement et à l'Afghanistan, qui s'ouvrira mercredi à Bucarest, plus que des visites symboliques en Ukraine et en Croatie programmées avant et après le sommet transatlantique, c'est de son face-à-face avec Vladimir Poutine dimanche prochain sur les bords de la mer Noire que pourraient venir les résultats les plus spectaculaires. Les deux hommes sont en fin de mandat (il reste un mois au Russe, neuf à l'Américain) et c'est leur dernière chance de laisser à leurs successeurs une relation bilatérale apaisée.
Il y a sept ans, Bush avait discerné «au fond de l'âme» de Poutine un partenaire «direct et digne de confiance». Malgré les tensions qui se sont multipliées depuis, il n'a jamais renié cette appréciation. «Ma stratégie a toujours été de maintenir une relation telle qu'il écoute ce que j'ai à lui dire», a expliqué le chef de la Maison-Blanche. Quitte à n'exprimer en public que des critiques modérées sur les infractions aux droits de l'homme et les dérives autoritaires du régime.
Cocktail explosif
Les circonstances de ce nouveau voyage présidentiel en Europe de l'Est (cela fait pratiquement trois ans que Bush évite l'Europe occidentale pour cause d'impopularité) recèlent les ingrédients d'un nouveau cocktail explosif entre les États-Unis et la Russie. Demain, à Kiev, Bush soutiendra publiquement le principe d'un « Plan d'action pour l'adhésion» (MAP) de l'Ukraine et de la Géorgie, première étape vers une éventuelle entrée dans l'Alliance qui rend les Russes furieux. Mais au sommet de Bucarest, il ne tentera pas de l'imposer, respectant «le processus de décision par consensus», prévient Steve Hadley, son conseiller à la sécurité nationale.
Vers un accord sur le bouclier antimissile ? Les membres de l'Otan qui, de peur de froisser Moscou, rechignent à tendre la main aux anciens satellites soviétiques n'ont pas subi les foudres de Washington. Si l'Otan botte en touche, cela pourrait en fait arranger le président américain, en focalisant le sommet sur l'envoi nécessaire de renforts en Afghanistan et en épargnant à Poutine une provocation lors de sa première invitation par l'Alliance. Car les deux hommes ont d'autres problèmes plus urgents à résoudre.
George Bush a confirmé mercredi le rendez-vous de Sotchi sans attendre que les modalités en soient arrêtées. Le même jour, une délégation du Kremlin se trouvait à Washington pour négocier sur sa proposition de «partenariat stratégique» avec la Russie. Une offre toute fraîche, lancée par le président Bush lors d'un coup de fil à Poutine le 7 mars, détaillée dans une lettre cinq jours plus tard et finalisée dans un document de huit pages présenté la semaine suivante à Moscou par la secrétaire d'État, Condoleezza Rice, et son collègue de la Défense, Robert Gates.
Vers un accordsur le bouclier antimissile ?
On ne connaît pas le contenu précis de cet «accord-cadre stratégique», qui pourrait englober à la fois le projet américain de bouclier antimissile, le contrôle des arsenaux balistiques et nucléaires, la coopération économique et l'accession de la Russie à l'OMC. «Peut-être les États-Unis, la Russie et l'Europe devraient-ils travailler ensemble à une architecture régionale, en partenaires égaux, pour se défendre contre les menaces du Moyen-Orient, explique Hadley. Ce que nous voudrions voir se produire.»
Malgré les assurances américaines, l'installation d'un super-radar en République tchèque et de dix silos de missiles antimissile en Pologne est considérée comme un acte hostile par le Kremlin. «Nous cherchons une formule de transparence qui donne confiance à la Russie et qui soit réciproque», explique-t-on à la Maison-Blanche. Le radar proposé par Moscou pourrait être intégré au système. Les Russes seraient invités à inspecter le dispositif, qui pourrait être mis «en sommeil» jusqu'à l'émergence d'une menace sérieuse.
«Je suis optimiste sur la possibilité d'aboutir à un accord sur ces sujets très importants, affirme George Bush. Je pense que beaucoup de gens en Europe pousseraient un soupir de soulagement si nous parvenions à un accord sur la défense antimissile. Et j'espère que ce sera le cas.» Un tel résultat étofferait le bilan international du président, imposant le bouclier antimissile à son successeur comme un fait accompli.

De notre correspondant à Washington Philippe Gélie31/03/2008 Mise à jour : 07:04
http://www.lefigaro.fr/international/2008/03/31/01003-20080331ARTFIG00244-bush-poutine-rencontre-de-la-derniere-chance.php

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