Les responsables russes, qui espèrent que la prochaine administration américaine remettra en cause le projet de bouclier antimissile, tentent de gagner du temps.
LE KREMLIN hausse le ton. Opposée au projet des États-Unis d'installer en Europe les bases du bouclier antimissile, la Russie vient de le faire savoir une nouvelle fois, de la manière la plus directe possible, à l'un des pays concernés : la République tchèque. Si le gouvernement de Prague accepte les radars américains sur son territoire, cela sera « une grande erreur », a déclaré hier le chef d'état-major de l'armée russe, Iouri Balouïevski. Un avertissement sans ambages présenté après sa rencontre à Moscou avec le vice-ministre tchèque de la Défense, Martin Bartak. Ce dernier a répondu en rappelant que son pays n'avait pas encore pris de décision finale.
Le général russe a en fait clairement fait comprendre que Prague devait différer sa décision. « Mes homologues russes et moi demandons simplement que le processus dure jusqu'en novembre-décembre 2008 et je pense que vous voyez tous pour quelle raison », a précisé Iouri Balouïevski. Allusion aux élections présidentielles américaines qui pourraient provoquer un changement d'opinion au sein même de la Maison-Blanche sur l'utilité du bouclier antimissile. Affirmant que la position de Prague répondait pour le moment à des critères plus politiques que militaires, le chef d'état-major n'a d'ailleurs pas caché envisager « la possibilité d'une nouvelle administration américaine réévaluant les positions actuelles de Washington »...
Aujourd'hui, l'Administration du président George Bush affirme que les bases prévues en République tchèque mais aussi en Pologne seront des équipements défensifs indispensables contre les attaques d'État « voyous », comme l'Iran. Moscou, qui doute de l'efficacité même du bouclier, craint au contraire que la Russie puisse être à terme visée. Et, depuis plusieurs mois, le Kremlin a multiplié les initiatives pour éviter cette implantation américaine chez ces anciens pays satellites. Lors d'un récent sommet, Vladimir Poutine a notamment proposé à George Bush d'élargir le système à d'autres pays. Dans le cadre d'une « plate-forme de coopération Russie-Otan », le chef du Kremlin a offert d'utiliser une base de radars russe en Azerbaïdjan, ex-république soviétique restée proche de Moscou, ou une nouvelle base en construction dans le sud de la Russie. Des propositions en cours de discussion entre experts des deux pays.
Manque de confiance
« Mais le Kremlin a l'impression que la Maison-Blanche ne l'écoute pas ! », assure Ivan Safranchuk, directeur à Moscou du bureau du World Security Institute basé à Washington. « C'était vrai hier avec l'élargissement de l'Otan. C'est encore vrai aujourd'hui avec le projet de bouclier. Le point de vue de Moscou n'est pas intégré, et la Russie sent qu'on ne lui fait pas confiance, ni aux États-Unis ni en l'Europe. Tout un paradoxe car, sur le projet de bouclier, Moscou se contente en fait de dire tout haut ce que beaucoup de capitales européennes pensent tout bas... » Un agacement palpable dans une grande partie de l'élite russe. D'où, sans doute, les propos très directs hier du chef d'état-major...
Le Firaro - ALEXANDRE CÈDRE. Publié le 22 août 2007
mercredi 22 août 2007
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