"Nos divisions sont des contes de fées exploités par des politiciens indécents", martèle le président ukrainien à la veille des législatives. Une interview à paraître mardi dans les colonnes du Figaro. En voici la retranscription intégrale.
LE FIGARO. – Avez-vous encore des doutes sur l’origine russe de l’empoisonnement dont vous avez été victime il y a trois ans ?
LE FIGARO. – Avez-vous encore des doutes sur l’origine russe de l’empoisonnement dont vous avez été victime il y a trois ans ?
Viktor IOUCHTCHENKO. – (long soupir) Trois laboratoires dans le monde produisaient ce type de dioxine. C’est très facile de déterminer l’origine de ce produit. L’expertise doit se conclure. Deux laboratoires ont envoyé des échantillons, pas le laboratoire russe. Cela limite l’enquête. Celle-ci a pratiquement reconstitué le puzzle. Les enquêteurs savent quand, quel repas, où, qui. Il y a des informations sur trois personnes clés qui sont en Russie. L’Ukraine a envoyé une demande d’extradition. J’en ai parlé personnellement au président russe en décembre dernier. Depuis, malheureusement, il n’y a pas eu de réponse. J’ai la forte conviction qu’après l’interrogatoire de ces personnes, les faits seront prouvés.
Y a-t-il une organisation derrière ces trois personnes ?
Ce n’était pas un acte privé.
Ces nouvelles élections du 30 septembre peuvent-elles résoudre les problèmes et les divisions du pays entre l’Est et l’Ouest ?
Ces divisions, ce sont des contes de fées exploités par des politiciens indécents. L’Ukraine est unie. Le président Koutchma (le prédécesseur de Viktor Iouchtchenko, NDLR) a toujours brandi le problème de la langue russe que certains veulent établir comme langue officielle. Cela n’a jamais abouti. Bien sûr, l’est et l’ouest du pays ont appartenu pendant trois cents ans à des empires différents, mais l’héritage et les efforts communs sont très forts. Les gens sont différents, mais ne sont pas des ennemis.
L’adhésion à l’Otan ne divise-t-elle pas votre pays ?
Mais je ne demande pas à mon pays s’il doit être ou non membre de l’Otan. La question est : quelle est la meilleure politique de sécurité et de défense ? Devons-nous adhérer à la politique européenne commune de sécurité et de défense ou mener seuls notre politique ? Si nous essayons seuls, ce sera très compliqué pour nous sur le plan financier et technologique. Il faut procéder par étapes, ce que l’Europe a réalisé depuis cinquante ans. Je suis optimiste, je sais que des dizaines de millions de personnes en Ukraine ont des idées modernes sur l’Europe.
Sur quoi peut déboucher ce nouveau vote, après tant de paralysies et de crises institutionnelles ?
Il y a six mois, des forces politiques ont voulu réécrire les résultats de l’élection de 2006 (en provoquant la défection de députés, NDLR). Cela fonctionnait comme cela, avant. C’était la règle numéro un de la corruption généralisée, qui avait ses racines au Parlement. Cette année, quand cinquante députés ont changé de camp, le Parlement a été dissous. Cela montre que notre nation soutient les principes démocratiques. Dans la prochaine législature, pas un député ne changera de camp. L’un des défis est d’amender la Constitution. La nation est d’accord à 92 % selon les sondages pour priver les députés de leur immunité absolue. Nous nous attaquerons à des privilèges indignes en démocratie, hérités du féodalisme. À travers cette crise, la nation a jeté ses menottes.
Excluez-vous, selon les résultats, de former une coalition avec le Parti des régions de votre rival Ianoukovitch ?
Bien sûr que je préférerais une coalition orange. Mais si une coalition orange est formée comme en 2006 uniquement sur la distribution des portefeuilles, cela ne marchera pas. L’idée n’est pas de former une coalition contre quelqu’un, mais de déterminer les enjeux autour desquels on peut s’unir. C’est ce que Ianoukovitch et le socialiste Moroz avaient signé en 2006, mais ils n’ont rien fait.
Propos recueillis par Fabrice Nodé-Langlois.
Publié le 10 septembre 2007 dans Le Figaro
Actualisé le 10 septembre 2007 : 19h59
Publié le 10 septembre 2007 dans Le Figaro
Actualisé le 10 septembre 2007 : 19h59
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