Par Andreï Vavra, RIA Novosti
Il est évident que la dernière séance de questions-réponses de Vladimir Poutine diffusée en direct par la télévision et la radio russes a battu tous les records. On ne pouvait s'attendre qu'à une performance de la part d'un président dont le moral est au beau fixe. Si, en 2006, la "ligne directe" avait duré 2 heures 54 minutes, cette fois-ci, Vladimir Poutine a parlé au peuple durant 3 heures 05 minutes.
L'année dernière, 50 questions avaient été posées, cette fois-ci, 68.
Plus de la moitié des questions portaient sur des sujets sociaux. D'ailleurs, la priorité évidente du dossier social était propre à toutes les précédentes séances de questions-réponses.
Vladimir Poutine a répondu à toutes les questions qui intéressaient ses interlocuteurs. Leur éventail était large: du parrainage des intermédiaires dans la vente de produits agricoles dans les régions à la construction d'un nouveau sous-marin nucléaire. Les questions portaient sur la hausse des prix des produits alimentaires et les perspectives de l'économie russe, sur le "plan Poutine", l'indexation des retraites militaires, les premiers résultats du nouveau gouvernement, les problèmes de l'île Rousski au Proche-Orient, la lutte contre le terrorisme, les problèmes de politique internationale, avant tout, celui du déploiement du système américain de défense antimissile en Europe, les résultats du match de football Russie-Angleterre, etc.
Vladimir Tchourov, président de la Commission électorale centrale, était certain que la loi ne serait pas violée au cours de ce contact direct entre le président et ses concitoyens et qu'il ne ferait pas de propagande électorale. D'ailleurs, une question posée au président se prêtait pourtant à le faire, à savoir pourquoi il a décidé de se placer en tête de liste électorale du parti Russie unie. "Il est très important que le parlement soit efficace à l'issue des élections de 2007. Le parti Russie unie a été ces dernières années le gage de l'efficacité du parlement. C'est pourquoi j'ai pris la décision de conduire sa liste", a déclaré Vladimir Poutine. Il s'est borné à qualifier ce parti de gage de l'efficacité du pouvoir. Il n'a pas dit: votez pour lui! Bref, selon Vladimir Tchourov, qui a déjà été assailli de questions par les journalistes, la loi n'a pas été violée.
La connaissance parfaite des problèmes examinés, qui ne concernent pas tous directement, semble-il, le champ des activités du président et sa volonté d'expliquer en détail la méthode de règlement de nombreux problèmes qui préoccupent les citoyens ont particulièrement étonné.
On peut citer ne serait-ce que la fécondation artificielle.
Le financement par l'Etat des opérations de fécondation artificielle en Russie doit tripler, en passant de 200 millions de roubles (plus de 5,6 millions d'euros) à 600 millions de roubles par an, estime Vladimir Poutine. Il a rappelé qu'environ 1.700 opérations de ce genre étaient effectuées chaque année en Russie aux frais de l'Etat. Chaque opération coûte 150.000 roubles. "Ces opérations ne sont effectuées que dans deux centres fédéraux, alors qu'il y a une cinquantaine d'établissements capables de les faire. Le problème réside, pour l'essentiel, dans le financement", a-t-il expliqué.
La stérilité est actuellement un des problèmes cruciaux en Russie, et des mesures énergiques sont prises en vue de stabiliser la situation démographique.
Cette question relève, semble-t-il, de la compétence de Tatiana Golikova, ministre de la Santé publique et du Développement social. Je suis certain qu'elle aurait pu y répondre également de façon détaillée. Mais, même si elle avait répété mot à mot les paroles du président, un doute aurait plané. Il en va de même pour les questions concernant tous les autres ministres: par exemple, Alexeï Koudrine, Elvira Nabioullina, Igor Levitine, etc. Le président est en fait l'unique personnage public qui jouit d'une réelle confiance.
Le pays est grand, les personnes compétentes y sont nombreuses, mais on ne fait pourtant confiance qu'à un seul homme.
Les propos tenus par Vladimir Poutine au sujet du déploiement d'éléments de la défense antimissile américaine en Europe doivent intéresser certainement nos partenaires étrangers. Le président a déclaré calmement et nettement: "Nous recherchons des moyens de régler les problèmes et de lever nos préoccupations. C'est pourquoi je n'estime pas que nous devions envenimer la situation". "Si une solution est adoptée sans prendre en considération l'avis de la Russie, nous prendrons des mesures de rétorsion qui assureront à coup sûr la sécurité des citoyens de la Russie", a affirmé le président.
Ces mesures sont déjà prévues. "Quant aux lieux de déploiement de quoi que ce soit: c'est la prérogative des spécialistes, avant tout de l'état-major général", a souligné Vladimir Poutine.
Après la fin de cette nouvelle "ligne directe", le président a répondu, comme il le fait traditionnellement, aux questions des journalistes. Elles portaient, bien entendu, non pas sur des sujets sociaux, mais sur la politique, notamment sur la question des prochaines élections, législatives et présidentielle, qui intéressent beaucoup les médias et les élites russes.
Une place vacante du pouvoir, celle du secrétaire du Conseil de sécurité, suscitait un certain intérêt. Chacun se demandait pourquoi ce secrétaire n'avait toujours pas été nommé, ses fonctions étant assumées par "intérimaire". Ne s'agissait-il pas d'une variante de l'après-élection, dont la probabilité a déjà été évoquée par les médias: les fonctions du Conseil de sécurité seraient étendues, par conséquent, Vladimir Poutine pourrait occuper ce poste temporairement après son départ de la présidence? Mais le président a fermement déclaré qu'il ne prévoyait pas de réformer le Conseil de sécurité. Une autre variante de l'après-présidentielle est tombée...
En outre, Vladimir Poutine estime que la présence d'une opposition de gauche ou libérale à la Douma (chambre basse du parlement russe) serait utile. Mais, sur ce point, tout ne dépend pas des souhaits du président. Une chose est sûre, nous ne verrons pas l'opposition libérale à la Douma à la suite des prochaines élections. L'opposition de gauche y sera en revanche certainement représentée, mais une question se pose: par quel parti?
Enfin, le point principal.
"Je suis contre la restriction des pouvoirs du président", a indiqué Vladimir Poutine, balayant ainsi le thème du glissement du pouvoir vers la Maison blanche (siège du gouvernement russe) après son départ. Une coopération plus efficace entre toutes les branches du pouvoir est certainement nécessaire, mais, "dans la période à venir, une nouvelle répartition des pouvoirs au sein de l'exécutif serait erronée", a-t-il déclaré.
Bref, toutes les dissertations sur la structure du pouvoir politique après le départ de Vladimir Poutine ne parviendront pas à dissiper ce flou. La seule réponse à toutes ces questions, c'est Vladimir Poutine qui l'a. Et même s'il avait parlé 5 ou 10 heures, il n'aurait rien dit de superflu.
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