Par Nadejda Ouzounova, RIA Novosti.
"50 heures de voyage - et vous voilà à Paris!" Ce slogan publicitaire peut sembler étrange lorsque que tout le monde sait que le trajet en avion entre Moscou et la capitale de la France ne prend pas plus de trois heures. Où est donc le hic?
Tout d'abord, dans un XXIe siècle hyperdynamique, les gens n'ont pas toujours la possibilité d'atteindre tel ou tel endroit en "vieille Europe" par des voies terrestres. Mais à présent, ces endroits "inaccessibles" sont toujours moins nombreux. La liaison ferroviaire directe entre Moscou et Paris va reprendre treize ans après sa suspension. A partir du 11 décembre 2007, le "wagon parisien" sera attelé au train Moscou-Berlin, puis à Berlin, à un train allemand allant jusqu'à Paris, a expliqué Mikhaïl Akoulov, vice-président de la société des Chemins de fer de Russie (RZD), lors de la récente présentation de cet itinéraire renouvelé.
Ce n'est pas un hasard si Berlin a été choisi comme lieu où s'effectuera cet attelage. Des recherches spécifiques ont permis d'établir que l'infrastructure ferroviaire berlinoise convenait on ne peut mieux pour une telle manoeuvre. En outre, les voyageurs auront de quoi s'occuper dans la capitale allemande pendant les douze heures d'attente, avant de poursuivre leur trajet.
Le nouveau wagon de fabrication allemande, adapté aux voies ferrées européennes, peint en blanc, bleu et rouge (couleurs du drapeau national russe), est aussi agréable à l'intérieur qu'à l'extérieur. Un décor et des draps dans les tons pastel, un service à thé au logo de RZD au lieu des verres habituels des trains russes, brochures et journaux en deux langues et même un lecteur vidéo (sur commande), voilà un bel environnement pour un voyage dans un style rétro et une atmosphère détendue.
Effectivement, "rétro" est le terme caractéristique le plus approprié pour définir cet itinéraire. Convenez que cela reviendrait trop cher de perdre deux jours de route alors que le temps est une chose si précieuse dans le monde contemporain. Cependant, il existe tout de même des circonstances où deux jours représentent peu de temps, d'autant qu'il s'agit ici d'un voyage qui s'effectue dans l'attente d'une merveilleuse rencontre avec Paris (ou bien avec Moscou), avec comme bonus une journée entière de promenade dans Berlin. Ce genre de voyage est donc plutôt à conseiller aux touristes ou aux jeunes mariés.
Ceci a d'ailleurs été confirmé par des représentants de RZD. RZD Tour, filiale de la compagnie nationale, a élaboré plusieurs programmes touristiques dans Berlin, Paris et Moscou (pour les voyageurs européens). La reprise de l'itinéraire légendaire est donc une action plus culturelle qu'économique. Les cheminots eux-mêmes (tant russes que français) y attachent une importance particulière, considérant leur activité comme étant une partie du processus général (et positif) de rapprochement entre les deux pays. Car les employés des chemins de fer s'occupent à nouer des contacts directs, au sens propre.
A notre époque mercantile, il semble peu probable que quelqu'un s'engage à utiliser de nouveau le train entre Moscou et Paris s'il n'y voit aucun avantage commercial. Or, les responsables de RZD insistent sur le fait que la volonté d'établir un lien supplémentaire entre les deux pays était l'un des principaux motifs de cette réalisation. Selon toute vraisemblance, les partenaires européens ont apprécié cette initiative et le grand travail de préparation sur le plan international a été mis en oeuvre deux fois plus rapidement que d'habitude, selon les responsables de RZD. Ceci a été assez difficile à réaliser, étant donné qu'outre Paris et Moscou, l'opération a concerné les cheminots allemands, polonais et biélorusses.
Il s'est alors avéré que même l'ajout d'un seul wagon supplémentaire, un changement apparemment insignifiant, était susceptible de perturber le fonctionnement du mécanisme exemplaire du trafic ferroviaire européen. D'habitude, le train de voyageurs en Europe se compose de douze wagons. Le wagon russe devrait donc être le treizième, ce qui faisait involontairement penser à un mauvais présage. Et pour cause, car la longueur des quais de la gare du Nord de Paris est équivalente à celle de douze wagons. Les spécialistes ont même évoqué la possibilité d'une reconstruction totale et d'un rallongement du quai, mais dans ce cas-là, on aurait du attendre l'inauguration de l'itinéraire encore dix ans. Ce sont les cheminots allemands qui sont alors venus au secours de leurs collègues russes et français, en sacrifiant leur douzième wagon dans le train Berlin-Paris, pour laisser la place au wagon moscovite. La gare du Nord a ainsi été préservée d'une reconstruction imprévue et par conséquent, le premier trajet sans correspondance Moscou-Paris aura lieu comme prévu.
Il est à noter que l'atmosphère de la reprise de la liaison ferroviaire directe entre les capitales russe et française a été dès le début imprégnée d'un certain romantisme. Il serait injuste de passer sous silence la participation aux négociations appropriées de l'actrice française Consuelo de Haviland, ou Doussia Kostolevskaïa, comme elle se nomme elle-même, étant l'épouse du célèbre acteur russe Igor Kostolevski. C'est elle qui a eu l'idée de reprendre cette liaison ferroviaire, interrompue en 1994 en raison de la situation financière difficile dans laquelle se trouvaient à l'époque les cheminots russes.
A ce propos, Paris n'est pas la seule ville avec laquelle la Russie reprend des liaisons ferroviaires directes. En Allemagne, c'est Munich qui vient allonger la liste des villes où l'on peut se rendre directement en train depuis Moscou (à partir du 7 décembre). S'y ajoutent également Amsterdam aux Pays-Bas et Bâle en Suisse. Parmi les pays d'Europe, seules la Grande-Bretagne, la Suède et la Norvège ne possèdent pas encore de liaison ferroviaire directe avec la Russie.
Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.
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