Par Piotr Gontcharov, RIA Novosti
Le nouveau rapport sur le programme nucléaire de Téhéran publié par le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) Mohamed ElBaradei pourrait diviser définitivement les Six (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU plus l'Allemagne), ce qui entraînerait inévitablement des sanctions unilatérales contre l'Iran.
Les conclusions formulées dans ce document sont loin d'être convaincantes, elles ne pourront certainement pas lever les inquiétudes suscitées par le nucléaire iranien, comme l'avait exigé la dernière résolution du Conseil de sécurité. Le rapport contient trop de "taches blanches".
Le terme de "taches blanches" est employé pour désigner les points douteux du programme nucléaire iranien qui suscitent des questions. Selon la version de l'AIEA, cela concerne huit interrogations. Elles devraient toutes être levées au printemps et en été 2008.
Au cours des négociations qui ont précédé la publication du rapport, Téhéran et l'AIEA devaient résoudre l'un des points les plus graves du programme: l'acquisition par l'Iran de technologies pour ses centrifugeuses d'enrichissement de l'uranium. Depuis qu'existe le problème nucléaire iranien, cette question reste cruciale, bien des choses dépendent de sa résolution, sinon tout. Cependant, malgré les déclarations optimistes des représentants de l'IAEA et de Téhéran, la phrase souhaitée "Ainsi, la question peut être considérée comme levée" ne figure pas dans la version finale du rapport d'ElBaradei. En fait, la question reste ouverte.
Le problème de la production "d'eau lourde" reste également en suspens, car toutes les centrales nucléaires que l'Iran s'apprête à construire ne seront équipées que de réacteurs à eau légère. Selon le rapport, l'exploitation de l'usine de production d'eau lourde "continue", mais l'agence n'a aucune possibilité de la contrôler. L'usine n'est pas inscrite sur la liste des sites à visiter par les inspecteurs de l'AIEA, car l'Iran ne ratifie et ne remplit pas les exigences du Protocole additionnel au Traité de non-prolifération des armes nucléaires et on ne sait s'il le ratifiera ou non.
Enfin, l'Iran a refusé de remplir l'exigence principale de la résolution: arrêter son programme d'enrichissement de l'uranium. Ce seul fait suffit pour que Washington, Londres et Paris reparlent de durcissement des sanctions. Il ne fait pas de doute que l'Allemagne les rejoindra.
La Grande-Bretagne et la France avaient déjà pris un jour l'initiative (avec le soutien ou à la demande des Etats-Unis) d'adopter des sanctions européennes unilatérales contre l'Iran sans attendre la résolution suivante du Conseil de sécurité. Moscou avait alors sauvé la situation. Au cours d'une rencontre avec son homologue français Bernard Kouchner, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov avait exprimé son profond étonnement quant à la violation du principe de règlement du problème iranien par consensus. Pékin avait alors, comme à son habitude, soutenu Moscou.
Cette fois-ci, il est pratiquement impossible de sauver la situation. La conclusion du rapport d'ElBaradei, selon laquelle l'AIEA "n'est pas encore en mesure de confirmer l'absence d'activité nucléaire (militaire) non déclarée de l'Iran" a définitivement divisé les Six. Si Moscou et Pékin considèrent cette situation comme un "diagnostic positif inachevé" et se prononcent de fait pour une poursuite du dialogue sans recourir à des sanctions, le "quatuor", quant à lui, l'évalue de façon diamétralement opposée, comme un témoignage de l'aspiration de l'Iran à créer une bombe atomique, et se prononce en faveur de sanctions immédiates en tant que mesure d'avertissement.
Il est peu probable que les parties parviennent à un compromis avant la prochaine réunion du Conseil de sécurité sur le problème iranien.
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